- Vous venez d’une famille d’immigrés juifs. Que pensez-vous de la politique belge et européenne en matière d’immigration ?
Le mal a commencé avec les lois Gol qui touchaient aux lois sur la nationalité. Un comble de la part d’un fils d’immigrés ! J’ai été choqué par ces lois qui ne visaient plus à intégrer mais à nous protéger des immigrés. Si mon père revenait aujourd’hui, il devrait repartir après ses études et ne pourrait rester. (...)
Les immigrés ne peuvent pas être intégrés et devenir belges." L’Europe a construit à ses frontières une ligne Maginot - et on sait combien elles sont vaines - pour différencier les uns des autres. Ils sont les Juifs d’aujourd’hui, accueillis avec la même réticence que les Juifs de jadis dont on disait qu’ils seraient impossibles à intégrer.
- D’où viendra le sursaut ?
Le sursaut viendra des gens et l’arrivée d’Obama a montré, avec ses limites, que c’était possible. Aujourd’hui, heureusement, on ne referait plus la même guerre, pour des raisons budgétaires. On ne peut déjà plus acheter de Rafales ni faire la guerre en Syrie. Mais le sursaut sera difficile quand nous sommes à ce point submergés de communications sur rien, jusqu’à être saturés par la pâtée qu’on nous sert.
- Qu’attendez-vous de 2014 ?
Mon souci est que seuls les méchants sont mis en vedette et jamais les bons. Dans cette optique, 2013 aura été l’année de Bachar El Assad. Je sais qu’Hitchcock disait qu’un film n’était vraiment réussi que si le méchant était réussi… Mais j’espère qu’en 2014, "les bons" vont enfin lever la tête. En 2013, "les bons" ont été incapables d’agir. Barack Obama, "le bon des bons", le Kennedy du XXIe siècle, a paru bloqué par le système démocratique. Comme François Hollande en France.
- Quel regard portez-vous sur l’Etat d’Israël ?
Mon père était sioniste quand Israël était encore une idée de gauche, laïque, en rupture avec les Juifs traditionnels. On avait alors l’idée d’y construire une société idéale, un grand kibboutz. Je me souviens qu’à l’arrivée de Menahem Begin au pouvoir en 1977, il a dit : "Il est pire qu’Hitler !" Pour moi, le contraste entre cette image idéale et la réalité d’aujourd’hui en Israël est saisissant. Je me sens très mal à l’aise. Je sais qu’Israël est la seule démocratie de la région, mais je ne me reconnais nullement dans le gouvernement actuel et dans l’occupation des territoires. Beaucoup d’intellectuels en Israël pensent d’ailleurs comme moi.